Chroniques théâtrales
Les critiques de spectacles de Margaux Palluet
Le plaisir d'écrire...
"Aimer, faire du théâtre, ou animer une Compagnie théâtrale, c'est aussi aimer les spectacles des autres.
Il m'arrive donc en partenariat avec le site www.theatrorama.com, de faire "quelques papiers" sur une pièce ou autre spectacle.
C'est un vrai plaisir, l'idée n'étant pas la critique à tout prix, mais une construction positive de ce que je ressens..."
Bonne lecture..
Kids
Un spectacle sur fond de guerre universelle
En lisant cette chronique, plongeons-nous un instant dans ce que le monde inflige hélas,
trop souvent aux innocents. Les guerres des hommes ! Violence universelle.
Nous sommes en 1992… Au siège de Sarajevo, le plus long siège de l’histoire de la guerre moderne. 4 ans de massacres qui opposent les forces de la Bosnie Bosnie-Herzégovine (qui avaient déclaré leur indépendance de la Yougoslavie), et les paramilitaires Serbes (qui voulaient rester attachés à la Yougoslavie). Laissons-nous maintenant prendre par la main, par la Cie APRES NOUS LE DELUGE, et partons dans leur voyage infernal et dramatiquement théâtral.
Les KIDS devenus trop vite Adultes
Sujet fort, tragique même, et tellement d’actualité la pièce de Fabrice MELQUIOT : KIDS …
La guerre de Bosnie dans la ville de Sarajevo, en fil conducteur, le premier jour de paix.
Tout est détruit, déchirant, brulant. Au milieu de ce cahot, 8 gamins orphelins, 8 adolescents livrés à eux-mêmes. Une seule raison pour eux : survivre. Et en ce jour dit de paix, ils voient tous une porte entrouverte sur un monde meilleur. Tous ces gosses abandonnés dans un monde trop grand pour eux, rêvent d’une vie nouvelle, « comme avant », avant la guerre…
Certains se défendront avec leur rêve, d’autres avec leur corps et leurs coups. L’amour adolescent les protège de la mort, l’amour fraternel les rend haineux. Même à plusieurs ils semblent accrochés à une solitude désarmante. « Je parle seul, parce que je suis seul » diront en boucle certains d’entre-eux. Alors oui… Nous partons avec eux, nous les accompagnons dans leur rage, leur colère et leurs larmes. Nous les comprenons ces KIDS qui veulent vivre à nouveau et tout oublier. On n’échappe pas à la mort sans cicatrice à l’âme.
Une violence scénique dérangeante
Cette pièce, ne laissera personne indifférent tant son texte vif et poétique vous met en émoi, comme presque mal à l’aise. En revanche on reste un peu en retrait sur la direction d’acteurs de Benoit Antonin Denis.
Jeune homme au talent certes prometteur, il lui manque sur ce spectacle, un souffle de rondeur, voir de bienveillance sur l’ensemble de son travail. Un regard plus humaniste, plus doux, l’aurait mieux servi. Tout, tout est violence et colère. Omniprésence des cris, des corps qui volent dans tous les recoins de l’espace scène.
Même si cela reste son parti pris, c’est trop sans doute pour un spectateur, qui même habitué au texte fort, attend aussi d’une mise en scène, qu’elle laisse de la place à son imagination, et ne cherche pas à imposer les choses. L’auteur marque le ton assurément dans ses mots, mais faut-il pour autant tout reproduire de la sorte ?
Les comédiens en demi-mesure pour certains, ne sont pas toujours les enfants que l’on attend. Trop physiques ou verbalement trop agressifs, leur jeu les amène parfois à étouffer le texte et dégage une froideur déconcertante. Cette jeune troupe dirigée par Marion Chobert mérite pourtant que l’on s’arrête sur son travail. Benoit Antonin Denis intègre à son action de metteur en scène, la vidéo, la musique, le chant, qui amène une originalité complémentaire à la pièce. (Saluons ici la belle présence vocale et théâtrale de Jonathan Pinto-Rocha). Des premières représentations qui méritent de l’attention, mais qui doivent continuer à évoluer pour toucher tant un jeune public qu’un large public.
KIDS
De Fabrice MELQUIOT
La Cie APRES NOUS LE DELUGE
Mise en scène : Benoit Antonin Denis
Du Lundi 2 MAI au Vendredi 6 MAI 2011
Théâtre LES ENFANTS TERRIBLES
157 rue Pelleport – 75020 PARIS
Réservations: 01 46 36 19 66
Hélène Serres
One woman show… A la française et surtout très Parisien
Hélène Serres présente au théâtre de Dix Heures, un one woman show écrit avec Corinne Berron.
Elle campe un personnage des temps modernes : Géraldine.
Parisienne par excellence, doucement folle dingue, bobo maladroite qui se perdrait dans un jardin botanique, Hélène « sert « l’artillerie complète de la jolie blonde à la quarantaine nouvelle, râleuse de tout et de rien, à laquelle on s’attache parce que reconnaissable parmi nous.
Mariée à Paul, deux jumeaux inscrits à l’école chic d’un quartier chic, elle est surtout préoccupée par « ses meilleures copines » Monica et Evelyne que par sa belle progéniture. C’est donc une succession de sketches tranchants entre la simplicité, le déjà vu, et le conventionnel.
Les histoires de la vie quotidienne version bobo
L’idée démarre par les tribulations infernales d’un essayage de jean pour la meilleure copine de Géraldine. Fil conducteur et intermèdes des sketchs. Bien évidement la copine est obèse et rien ne lui va…
Passent alors en revue, les histoires quotidiennes de cette grande Géraldine, qui se noie bien entendu, très facilement dans un verre d’eau. Élégante et snob, elle balade avec une certaine désinvolture, son petit monde un peu partout dans sa vie.
Et passe… La journée interminable à la kermesse des jumeaux, l’exposition d’art contemporain ou elle prend l’œuvre d’art pour un porte manteau, le bilan de compétences ou elle ne comprend rien, les embouteillages énervants, puis l’irrémédiable sketch du comment apprendre à sa mère à se servir de son portable.
La revue des classiques que l’on connait déjà. On rit gentiment. C’est agréable à regarder, mais on peut s’étonner cependant de quelques mauvaises chutes de fin de sketches. Ça manque quand même de rebondissement et parfois de rythme… Dans la vie, la vraie, elle est parrainée par Sylvie Joly et l’on n’en ait pas étonné. Une ressemblance dans le phrasé ou la façon de se mouvoir sur scène, vous ramène indéniablement à elle. Pas de vulgarité dans les textes, et quelques bonnes manières suffisent à plaire au public.
C’est donc un spectacle qui se laisse regarder mais qui ne vous marquera pas d’une pierre éternelle.
On aurait sans doute aimé que Hélène Serres prennent un peu plus de risque, et nous emmène sur des textes nouveaux, voir des idées nouvelles… Il faut faire monter encore un peu plus haut la maturité du spectacle, et continuer le parcours d’écriture vers un travail plus abouti. On passe quand même un bon moment, parce que c’est frais et joyeux, et que l’on a le sentiment en fin de spectacle (avant même !) d’avoir croisé Géraldine au coin de la rue de l’école de notre petit dernier…
One woman show
Spectacle de Corinne Berron et Hélène Serres
Mise en scène Corinne Berron
Jusqu’au 19 juin
jeudi, vendredi, samedi à 19h
Théâtre de Dix Heures
36 bld de Clichy, 75018 PARIS
Réservations: 01 46 06 10 17
17 fois Maximilien
Psy choc
Voilà un spectacle de théâtre qui change un peu les genres. Surprenant, le One Man show de Nikola Parienty invite à un voyage intérieur loin de laisser indifférent le spectateur qui s’arrêtera sur ce choix. Chacun s’interrogera alors sur l’importance de la psychanalyse à un moment de sa vie. Un thème unique qui vous mène par le bout des idées durant 1 heure sans répit. C’est un bon début et l’histoire démarre ainsi…
Maximilien est acteur et dramaturge. Un peu perdu à la quarantaine arrivant, il décide d’entreprendre une thérapie afin d’acquérir une certaine crédibilité en tant qu’acteur avec un grand A. Mais de petits travers qu’ils pensent balayer du haut de sa splendeur, il va vite s’apercevoir que se sont des troubles beaucoup plus dérangeants qu’il ne l’imaginait… Et c’est drôle, finement drôle. On ne s’ennuie pas.
Un psychiatre imaginaire et un acteur vrai
Écrit avec beaucoup d’intelligence par Richard Charest, ses dialogues redoutables, permettent à Nikola Parienty de camper un Maximilien aussi drôle qu’émouvant.
« Max » n’a aucune idée de la marche à suivre ou des procédures habituelles de ce genre de « travail sur soi ». Il s’interroge durant 17 séances face à un psychiatre que l’on ne fait qu’imaginer.
La mise en scène inventive, permet 17 séances intenses, drôles, face à un public qui pourrait bien par contre, se prendre pour le psychiatre de Maximilien, telle l’interactivité existante. Nikola Parienty est un très puissant acteur au vrai sens du terme. Il tient son personnage par l’esprit, par le cœur et par une présence physique indéniable. Sa voix, son visage sont imprégnés d’une vérité que l’on devine. Cela pourrait presque déranger au départ de ce show, mais on se laisse vite prendre par son charisme évident. Ce rôle était pour lui.
L’écriture est captivante, car elle donne les clés au fur et à mesure des minutes qui passent.
L’importance des mots permet d’adoucir l’esprit de Max si compliqué qu’il soit.
On sourit de bon cœur devant sa stupidité bonne enfant, et l’on est touché devant ses attitudes d’homme perdu mais combattant. Personne n’est invincible, et surtout pas le psychiatre…
Ce personnage seul en scène, à la belle ingéniosité de nous faire rire, de nous interroger, et de nous étonner en même temps. Une leçon de vie efficace et si vraie. Avec une approche de la psychanalyse comme thème de one man show, on n’imagine pas un instant que l’on puisse faire autant réfléchir intelligemment le public. D’où un théâtre qui change un peu les genres.
C’est un pari réussi entre les deux complices que sont Nikola Parienty et Richard Charest.
Deux grands comédiens qui se sont rencontrés en 2008 sur le spectacle musical « les aventures de Rabbi Jacob », et ont décidé de travailler ensembles pour 17 fois Maximilien.
Spectacle à voir avec plaisir pour y découvrir la sincérité, l’absurdité des hommes, et en finalité, le lâcher prise. Comme le dit Max : « portez-vous bien »…
Interprété par Nikola PARIENTY
Une comédie écrite et réalisée par Richard CHAREST
Jusqu’au 29 juin -Le Mardi à 20h
Théâtre Montmartre Galabru
4 rue de l’Armée d’Orient, 75018 PARIS
Réservations: 01 42 23 15 85
Ladies night
Histoire d'hommes et changement de vie
Dans une ville ouvrière du Nord de la France, une bande de copains, six chômeurs en fin de droits, se lance un défi : faire un strip-tease comme les chippendales, pour gagner « de la thune », épater les filles et se prouver qu’ils sont encore capables d’exister au-delà de leur détresse sociale, familiale et morale. Au milieu de ce projet fou, une femme (elles sont toujours au cœur des hommes et du monde) Glenda, ex danseuse, les soutiendra et les amènera au show final : la réussite.
C’est une fable sociale que nous découvrons, ou le désespoir et l’espoir font face, ou la visibilité des corps à nus s’étale sans vulgarité, et où la lutte pour s’en sortir est plus forte que tout. Un petit bijou de l’expérience humaine.
Une pièce de théâtre avant d’être un film. Ladies Night avant l’adaptation cinématographique de Peter Cattaneo The Full Monty (1997), fut une pièce à succès signée par deux Néo-zélandais, Anthony Mac Carten et Stephen Sinclair. Traduite dans une douzaine de langues, elle fait depuis le tour du monde au théâtre. Lors de sa création en France dans la traduction de Jacques Collard et l’adaptation d’Hélène Helle, Ladies Night obtint le Molière 2001 de la meilleure comédie.
Depuis, les tournées théâtrales s’enchaînent avec le même succès. Un voyage empreint d’humour et de dérision, de dialogues toniques et percutants. On rit du début à la fin, on applaudit à s’en faire mal aux mains, on se sent bien, sans doute parce qu’on s’identifie d’une façon ou d’une autre à ces personnages touchants, et à cet univers réaliste d’une société en crise.
Une leçon de vie
Les acteurs qui s’exposent ici avec pudeur et moquerie, sont tous à leur place. Tout va vite et on ne s’ennuie pas. Ils s’amusent et cela se voit, même si on imagine que les répétitions n’ont pas dû être simples. Ces hommes différents, des biens foutus et des « gaulés comme des buvards » sont capables de passer de l’émotion à la nudité la plus totale. Jolie prestation. La mise en scène de Guylaine Laliberté sait les rendre beaux. Elle met en avant l’aspect ringard des personnages et leur machisme habituel, et leur dégage un air naturel et une sincérité déconcertante.
Au-delà du strip-tease qui fait sourire, c’est surtout un regard cruel sur une société en souffrance. Les auteurs ont traité avec finesse les rapports entre les hommes et les femmes, et se sont appliqués à y mettre tout l’humour et la tendresse nécessaires pour passer un bon moment. Une leçon de vie à ne pas manquer. On se sent bien après ce spectacle, et c’est un pari réussi pour une belle troupe de théâtre qui mérite leur succès.
Co-écrite par Antony McCARTEN, Stephen Sinclair
Mise en scène Guylaine Laliberté
Avec Marc DIABIRA en alternance avec Alain AZEROT, Pascal Aubert, Laurent MENTEC, Michel LALIBERTE ,
Sacha PETRONIJEVIC en alternance avec Pascal GUIGNARD, Franck PARTAUD, Michel VOLETTI et Marielle Lieber-Claire
Jusqu’au 27 février 2010
Les vendredis et samedis à 20h30
Théâtre Essaïon
6 rue Pierre au Lard 75004 PARIS
Réservation : 01 42 78 46 42
Saint-Germain des Prés en chansons
Du côté du Flore
2010. Au cœur du 21ème siècle… Le temps est aux spectacles musicaux. De 1946 à 1960, à Saint-Germain des Prés, la chanson française connaît son moment de gloire. 50 ans plus tard, le spectacle de Dominique Conte rend hommage à ces grands artistes de l’Après-guerre. Ils sont là… Prévert, Vian, Greco, Ferré, Gainsbourg, Queneau, Sartre, De Beauvoir. Ces hommes et de ces femmes qui ont fait l’âme de Saint-Germain des Prés et les beaux jours des existentialistes. Au théâtre de Nesle, le spectacle prend vie, et le passé ressurgit. Trois jeunes musiciens très brillants, une chanteuse d’aujourd’hui, une table de bistro, un micro qui vibre… Au creux d’une cave, au fond d’une voix, l’histoire se raconte et s’attarde en chansons.
Remonter le temps
C’est ce que s’applique à faire Dominique Conte. Entre deux chansons, une lumière douce, un violon qui s’envole, elle nous raconte avec cette voix grave, les fragments amoureux des gens de lettres, de la toute jeune Gréco et son hésitation à chanter, de l’évolution du Jazz et de la Nouvelle-Orléans, du café Flore et des Deux Magots, et de qui alors venait s’encanailler à la Rose rouge…
L’idée de remonter le temps en s’entourant de trois jeunes hommes (Benjamin le guitariste est âgé de 18 ans) est bonne, d’autant plus que leur talent musical est flagrant. Ils aménagent d’ailleurs plutôt bien certaines faiblesses vocales de la chanteuse. Un quatuor qui revisite le mythique quartier de la rive gauche à travers une vingtaine de chansons et de textes signés des plus grands. Des moments savoureux certes, mais qui restent néanmoins frustrants.
Il y a une sorte d’embarras en écoutant Dominique Conte. Un manque d’allant se ressent, peut-être est-ce du à sa retenue et son sérieux répétitif. Elle perd parfois son souffle sur les chansons qu’elles réadaptent en gommant parfois l’essentiel, et d’un spectacle que l’on attend animé, on aurait tendance à ressortir sans l’énergie à laquelle on croyait.
Les titres s’enchaînent parfois avec humour ou avec émotion, mais nous laisse sur notre faim. La voix reste belle mais inégale. La mise en scène sobre ne bouscule pas les habitudes, mais a le mérite de donner vie aux pierres de la cave du théâtre. Il y a une application lumineuse dans les panoramas utilisés par Bertrand Lesellier. Les couleurs douces et chaudes illuminent la scène et réchauffent les cœurs en mal d’inattendu. Alors pour qui aime l’univers de ces grands noms trouvera charmant ce spectacle. Mais sans grand revirement scénique et musical. Un certain déjà entendu…
Dominique CONTE chante…
Accompagnée par florian SATCHE, Théo CECCALDI, Jimmy TOP
Mise en scène Yves HIRSCHFELD
Tous les Mardis à 21H00
Théâtre De Nesle
8 rue de Nesle – 75006 PARIS
Réservations : 01 46 34 61 04
Giacomo sur les planches
L’histoire et le petit monde de Giacomo.
La France d’après mai 68, l’immigration italienne, la découverte du théâtre, la garde robe de Sandrine, « les gueulantes » de l’oncle Eddy, et les parents du jeune Giacomo. Le père qui parle de la Méditerranée comme jamais, la mère sensible et ingénue qui regarde son fils grandir… C’est ainsi que prend vie le petit monde de Giacomo à travers plus de 30 personnages interprétés par Gilbert Ponté.
Il va durant 1h30, nous raconter son adolescence et nous faire aimer le petit Giacomo. C’est avec le sens de la comédie humaine dont il a le secret, que la promenade commence, un coup en Italie, un coup à Paris… On y croit.
De Gilbert à Giacomo
Ce qu’il faut bien retenir de ce spectacle théâtral, ou se mêle également, musique Italienne et musique Française, c’est la capacité incroyable de Gilbert Ponté à se transformer le plus naturellement possible. Des voix de femmes à celles des hommes, de Saint-Sébastien sur sa croix au diable guérisseur, tout prend vie avec une histoire formidable.
Il se promène dans le monde des hommes avec une aisance troublante. Mais comment fait-il pour tout conjuguer en même temps ? C’est son talent répondrons-nous… Alors on prend volontiers la main de ce petit bonhomme qu’est Giacomo et on se laisse guider dans son voyage. Voilà que Molière lui parle… Comment faire comprendre à tout son petit monde, son goût incroyable pour Scapin et ses fourberies ? Il traverse les portes une à une et nous fait rêver comme jamais. Et avec une vraie persévérance d’adolescent passionné, il finira enfin par jouer sur scène, là au milieu de son public à lui, puis nous public réel, acclamé par une salle enchantée.
Des planches solides…
C’est le deuxième volet de la trilogie autobiographique des aventures de Giacomo. Un premier spectacle s’intitulant l’enfant de la cité avait déjà enchanté les foules.
Il n’a rien perdu dans cette jolie suite. Une écriture mature, poétique et un humour aussi bon qu’inattendu. Stéphane Aucante a su parfaitement répondre aux attentes de l’auteur. Comme le dit Gilbert Ponté, « j’ai trouvé un regard, presque un miroir, attentif et exigeant ». Tout y est bien pensé. Une chaise, un fauteuil à deux places, ou un costume accroché à un portant, suffisent à tout nous faire comprendre. Apparaît parfois sur le mur, une vidéo ou défilent des ruelles italiennes. Un délice.
Cette collaboration est efficace et permet de mettre en avant, une histoire universelle qui même au 21ème siècle, nous fait comprendre la difficulté de l’intégration…
De et par Gilbert Ponté
Mise en scène et Adaptation Stéphane Aucante
Jusqu’au 31 janvier 2010 à 21h00 : Manufacture des Abbesses (Paris18)
Du 16 au 20 février 2010 à 20h30 : Espace Kiron (Paris 11ème)
Du 18 au 21 mars 2010 à 20h30 : Montargis (45)
Les 23 et 24 mars 2010 à 20h30 : Brunoy (91)
Les 6 et 7 avril 2010 à 20h30 : Marseille (13)
Les 9 et 10 avril 2010 à 20h30 : Montpellier (34)
Le 22 mai 2010 à 20h30 : Le Plessis Robinson (92)
Les 6 et 7 mai 2010 à 20h30 : Limoges (87)
Les 28 et 29 mai 2010 à 20h30 : Pontarlier (25)
Les précieuses ridicules
Une comédie si précieuse
18 novembre 1659. La première « des précieuses ridicules » est donnée au théâtre du Petit Bourbon à Paris. A la ville comme à la cour, c’est un vrai succès. Les siècles passent. L’air du 21ème a sonné. Nous voici en Novembre 2009. Théâtre de l’Essaïon à Paris toujours. La pièce est rejouée et le succès n’a pas bougé. Toujours frappé d’étonnement lorsqu’on la relit où la rejoue, Le texte est cruel, touchant, tragique. Toujours ce regard si juste, sur les conditions et la bêtise humaines. Molière est un grand homme.
Magdelon et Cathos, deux jeunes provinciales, arrivent à Paris en quête d’amour et de jeux d’esprit. Gorgibus, père de Magdelon et oncle de Cathos, décide de les marier à deux prétendants, La Grange et Du Croisy, mais ces dernières les ridiculiseront de telle façon que ceux-ci voudront se venger de ces « précieuses ». Entre alors en scène un jeune homme, Mascarille, se prétendant homme du monde fréquentant les meilleurs cercles, qui tombera amoureux de Magdelon. Vient ensuite un second homme, Jodelet, dont Cathos s’amourachera. On découvre ensuite que ces deux hommes sont des imposteurs, soit les valets des deux premiers hommes rejetés. Les précieuses sont tombées dans le piège et ont donc montré le ridicule de leur vanité…
L’âme de Molière rôde…
On pourrait penser qu’un énième Molière pourrait lasser. Mais non pas du tout. On se laisse prendre assez facilement grâce au jeu efficace des comédiens. La salle est pleine et les rires fusent. Dans l’adaptation de Sylvain Ledda, le metteur en scène, il y a un ton juste. Sans doute parce qu’il a pris le recul nécessaire pour ne pas partir immédiatement sur le jugement des personnages, ce serait trop facile. Il ne condamne ni les femmes ni les hommes de cette farce cruelle, il laisse le spectateur juger avec ses propres sentiments. Garder le rire acerbe pour cacher les mœurs de cette société ridicule qui se veut mondaine, est un bon savoir-faire tel que l’aimait sans aucun doute le grand Maître. Sylvain Ledda reste fidèle à l’esprit de Molière en choisissant une mise en scène sobre et intelligente, et on se retrouverait presque à la cour si l’on poussait un peu l’imagination du spectateur…
Rien n’aurait pût fonctionner aussi bien, sans cette troupe de comédiens tous de bons niveaux. Florence Cabaret campe une Magdelon parfaite, sachant moduler sa voix entre le rire et la stupidité, et c’est une excellence dans le théâtre classique. Sa partenaire Séverine Cojannot joue elle Cathos et trouve très justement sa place, face à un autre personnage qui pourrait facilement prendre le dessus. Les rôles des hommes sont énergiques, drôles (sauf peut-être le père qui ne semble pas tout à fait à sa place dans ce rôle) interprétants tour à tour des individus mesquins, mondains ou homme du peuple. C’est donc un bon moment à passer. Un théâtre classique fait pour tous les publics, ou l’on ne s’ennui pas. Monsieur Jean Baptiste Poquelin est toujours dans l’air du temps…
Les précieuses ridicules - De Molière
Mise en scène : Sylvain LEDDA
Avec la Compagnie PARTAGE
créé par Florence CABARET et Séverine COJANNOT
Jusqu’au 3 janvier 2010
Les vendredis et samedis à 20h
Théâtre Essaïon
6 rue Pierre au lard – 75004 PARIS
Réservations : 01 42 78 46 42
La Musica Deuxième
Plus qu’une Duras… Une marguerite
Le plaisir de retrouver dans cette courte pièce, l’écriture de Marguerite Duras, dans laquelle elle livre avec toute l’émotion qu’on lui connait, l’intensité d’une relation amoureuse et les dégâts de la rupture.
Un bar d’hôtel feutré. Deux grands fauteuils en guise de décor principal. Lieu d’un grand amour passé entre un homme et une femme. Leur divorce vient d’être prononcé, et ils se retrouvent seuls une dernière fois. Ils ne se sont pas revus depuis 4 ans. Ils ont quelques heures, une nuit, pour enfouir leur histoire et essayer de comprendre ce qui c’est réellement passé. Pourquoi cet amour les a dépassés…
Le voyage des souvenirs commence. Ils surgissent des mémoires abîmées. Les anciens amants se vouvoient, se regardent, s’observent, se frôlent, se cherchent. Les larmes coulent aux coins des yeux, le rire se déploie avec une infinie hésitation, et les mots si durs ou si bons soient-ils, les conduiront à leur amour encore bien réel mais définitivement impossible. Un huis clos bien ficelé. Le spectateur y verra sans doute un reflet de sa propre vie. Toute la force d’un texte merveilleux.
Une conversation intime…
La mise en scène de Régis Mardon est sobre et proche de la réalité d’un couple qui s’engage dans une conversation intime. Ce couple mené par Didier Mérichou et Elodie Sörensen nous entraîne avec eux, invités à entendre leur histoire comme des amis et à en percevoir le sens avec nos propres émotions.
Même si le début de la pièce démarre avec une lenteur dérangeante, tous les deux sont portés par leur personnage. Didier Mérichou est dans la retenue, l’émotion palpable d’un acteur qui joue sur la corde sensible, passant de l’excitation à la résignation avec une méthode éprouvée. Elodie Sörensen glisse dans l’espace avec élégance. Elle s’empare du rôle à bout de bras en laissant couler l’empreinte nécessaire pour se souvenir d’elle.
Il faut noter aussi un autre mouvement de mise en scène. La présence de trois écrans vidéo sur scène signée Mathilde Morières. Elle filme joliment les trajets des amoureux durant leur histoire. Une façon de mettre le passé dans le présent. Sur ces images la musique de Madredus.
Ce spectacle déjà présenté au festival off d’Avignon en 2008 avait remporté un vif succès. Il continue son chemin en 2009 avec la même intensité et la même énergie.
Il faut voir ou revoir cette pièce. Duras traverse les années sans faille, et c’est un pur bonheur théâtral.
De Marguerite DURAS
Avec :
Didier MERIGOU et Elodie SÖRENSEN
Mise en scène : Régis MARDON
Assisté de Laurence PORTEIL
Vidéo Art : Mathilde MORIERES
Les mercredis et jeudis à 20H
Du 11 novembre 2009 au 25 février 2010
Théâtre de l’Essaïon. 6 rue Pierre au lard. 75004 PARIS
Réservation : 01 42 78 46 42
Céline Iannucci dans Sans demi-mesure
Céline Iannucci … Parce qu’elle le vaut bien....
Céline Iannucci, jeune femme aux multiples talents, nous entraîne dans un très bon
one woman show comme on les aime. Ancienne partenaire de Florence Foresti et Cécile Giroud dans les « Taupes Models » sur canal +, elle décapait alors les visiteurs du petit écran » parce qu’elle le valait bien ». Depuis, elle a pris son envol et c’est en solo qu’elle cartonne.
Textes, chansons et réalisme du quotidien…
Elle écrit tous ses sketchs avec une plume aiguisée, drôle et sympathique. C’est ainsi que l’on retrouve toute une galerie de portraits plus vrais que nature. Tour à tour, les scènes de la vie quotidienne prennent leur sens. Et l’on y croit, et l’on s’y voit. Sans demi-mesure est le nom de son spectacle. Et il faut bien reconnaître qu’elle nous prouve, double décimètre en main, que son humour est à la hauteur de son talent.
Le fil conducteur, c’est elle.
Jeune femme bien foutue, jolie et qui nous raconte l’air de rien, ses débuts sur la scène artistique, la dame revêche du pôle emploi spectacle qui l’envoi sur des castings impossibles (et là les imitations des filles trop belles ou trop idiotes prennent vie) , ses tocs qu’elles nous dévoilent sur scène (démarre alors une franche partie de rigolade), ou bien la tata Céline qui assiste à l’éducation de ses neveux avec une mère ignoble qui finit par leur faire un chèque de 5000€ pour avoir la paix… Une caricature qu’on adore tant elle semble presque vraie ! Hilarant aussi quand vous la voyez taper à répétition sur les touches de son téléphone et de vous balancer « je fais ce que je veux, c’est mon spectacle ». Elle à raison c’est le sien, et c’est drôle…
Particularité supplémentaire, elle compose et chante durant plus d’une heure. On retrouve d’ailleurs dans ses chansons une humanité plaisante bien planquée derrière le rire.
Tenir le cap et voir grand…
La mise en scène de Yves Hirschfeld s’emploie à la faire bouger avec élégance sur scène. Son piano c’est son partenaire de scène et cela se voit. Elle joue avec lui comme avec un autre acteur. Dans le travail d’écriture de Céline Iannucci, on distingue des thèmes connus certes, mais qui résonnent bien différemment, sans doute parce qu’elle a ôté tout lien à la vulgarité et que la simplicité à du bon. Elle reste naturelle et portée par une bonne dose de dynamisme. Il faut lui souhaiter de tenir le cap longtemps… Si certaines de ses consœurs s’expriment sur de grandes scènes, il n’y a aucune raison que Melle Iannucci n’en fasse pas autant. Elle le mérite vraiment. Alors filez voir ce spectacle et vous passerez un bon moment.
Ecrit et interprété par Céline IANNUCCI
Mise en scène Yves HIRSCHFELD
Théâtre Montmartre GALABRU
4 rue de l’Armée d’orient – 75018 PARIS
Réservation : 01 42 23 15 85 – Du jeudi au samedi à 21H30
L’école des veuves
Le talentueux Jean Cocteau
Pour qui aime Jean Cocteau, trouvera sans doute plaisir de le retrouver dans cette pièce plutôt méconnue de la plupart de ses grands chefs d’œuvres, et retrouvera le talent du Maître. Toute l’aptitude de Cocteau résulte dans le regard qu’il portait sur le monde. Nous retrouvons donc dans cette pièce, un texte drôle, léger, simple, traitant de la fidélité et de l’amour.
A la mort d’un prince respecté de tous, sa veuve décide qu’elle ne peut survivre à sa disparition, son rang et ses coutumes religieuses lui imposant de le suivre dans la mort. Sa servante dont la vie est liée à celle de sa maîtresse, est persuadée qu’alors elle devra mourir elle aussi. Mais n’ayant aucune envie d’abréger sa vie, elle va essayer de convaincre sa maîtresse de renoncer à cette terrible idée, en lui faisant miroiter les plaisirs, notamment charnels, de la vie. Un garde, présent sur les lieux où les deux femmes veillent le défunt, servira la cause de la servante qui va l’utiliser pour réveiller les désirs de sa maîtresse.
Une pièce qui reste orpheline
Les thèmes sont donc pertinents, et l’on devine alors, qu’il faut continuer de vivre et d’aimer, même après la disparition du bien-aimé. La mise en scène de Dejan Ilic est intéressante dans le mélange des genres, puisqu’il associe vidéo, musique et danse, le tout dans une modernité agitée et déconcertante. Là où le bât blesse, c’est le démarrage. Quel intérêt de projeter le début de la pièce sur une scène de théâtre, avec un écrivain raté, qui attend Fanny Ardant pour la lecture de sa pièce ? Arrive une autre jeune actrice, aussi ratée que lui, et qui rêve bien entendu, du rôle de sa vie. Il la traite avec mépris et violence, et Fanny Ardant n’arrivera jamais. Cette première partie n’apporte rien à la pièce de Cocteau. Elle ne fait qu’alourdir le démarrage de la pièce et l’on s’y ennuie ferme.
La seconde partie arrive, et nous passons alors dans un autre univers, celle de L’école des Veuves. Autre histoire… autre époque. Le travail du metteur en scène prend alors forme, et petit à petit nous découvrons le texte.Alors oui, la projection d’images fait sourire, il s’appuie sur une scénographie baroque, et l’apparition de la « grosse belle-sœur » de la veuve, à la voix étonnante, porte à elle seule une drôlerie sympathique.
Les vidéos sexy, le début d’un striptease, pourquoi pas. C’est le parti pris du metteur en scène. Mais tout ceci laisse un sentiment d’un travail non abouti, malgré la présence d’idées charmantes. Les acteurs déploient une énergie pour faire rebondir le texte, mais l’on n’y croit pas beaucoup. A force de caricaturer les personnages, on en oublie le texte, et c’est fort dommage. Les inconditionnels de Jean Cocteau risquent d’être déçus, sauf avec une bonne dose d’indulgence…
L’école des veuves
De Jean COCTEAU
Mise en scène et vidéos Dejan ILIC
Adaptation de Jean-Yves DRETZOLIS
Avec Marie DELAROCHE, Anne CADILHAC, Richar MEDKOUR
Jusqu’au 25 juillet
lundi et mardi à 20h jusqu’au 30 juin. A partir du mercredi 1er juillet : du mercredi au samedi à 20h.
Théâtre de L’Essaïon
6 rue Pierre au lard – 75004 PARIS
http://www.essaion-theatre.com/
Réservations : 01 42 78 46 42
L’éveil du printemps
L’éveil des sens
L’adolescence… ce moment si crucial ou tout se découvre, se forge, se transforme, ou les interdits naissent, où l’on ressent les premiers émois, l’éveil des sens charnels et la combinaison que l’on en fait pour passer à la vie d’adulte. C’est avec une belle et émouvante écriture, que Frank Wedekind a traitée ce thème écrit en 1890.
A l’époque, représenter cette pièce fut un vrai combat pour l’auteur, tant elle était jugée violement anti-bourgeoise et immorale. L’Allemagne était encore loin d’être le pays des libertés, et Wedekind était un persécuté né. Il dressait alors le portrait d’une société puritaine, encrée dans des principes éducatifs réactionnaires. Dérangeant pour la bonne société allemande… Ce n’est seulement qu’en 1906, qu’elle vue le jour pour la première fois. Aujourd’hui, la pièce résonne comme une vérité dérangeante, et la censure n’existe plus. Tant mieux ! C’est une pièce forte, et il ne faut pas s’en priver. Il est bon de trouver des metteurs en scène talentueux pour lui redonner vie, un siècle plus tard.
Transgression réussie
Cinq adolescents… Melchior, Wenders, Ilse, Moritz, Hans, sont de jeunes adolescents éduqués dans un carcan des plus conventionnel, les empêchant d’éveiller leurs sens. Les adultes trichent, mentent sur le monde qui les entoure, tout leur ait cachés parce que tabou. On leur invente des histoires de cigogne, on leur défend de vivre leur première expérience. On les prive de leur rêve et de leur soif de découverte, on leur impose Faust et l’arithmétique, un système déroutant et dangereux. Et c’est ainsi que naît leur souffrance, parce que les corps parlent et finissent indéniablement par gronder. Leur conscience grandit, et personne ne peut s’y opposer. Elle développe chez certains, révolte ou douceur, mais elle les fait exister. Parfois dans la mort, parfois dans la vie. Pourquoi faut-il briser les étreintes de nos enfants ? Telle est la question que pose l’auteur… Seul sont responsables les adultes qui oublient eux-mêmes qu’ils furent des enfants.
Se confronter à « l’Eveil du printemps », est un travail délicat et fantastique à la fois.
C’est une troupe d’acteurs remarquables qui s’emparent de ces jeunes personnes. Ils sont à peine plus grands que leurs rôles, du moins c’est l’impression qui s’en dégage, et ils les portent à bout de bras. Un à un la poésie des mots exultent de leur voix, et de leur corps. Florian Pautasso est un Melchior époustouflant de fragilité, et tous, sont dans une gravité chavirante. L’adaptation et la mise en scène de Marion Chobert sont intelligentes, belles et originales. De deux rochers perdus au milieu de la scène, d’une jeune fille qui se meurt en direct sous nos yeux, d’une poignée de talc qui s’envole et symbolise le rêve ou le désir, tout vous emmène dans le voyage de la tragédie enfantine. C’est un plaisir que de voir ces acteurs se fondrent dans ce décor tout de blanc entouré. Il faut souhaiter à cette troupe, la longévité de cette aventure théâtrale. L’adolescence gagne la partie, même si elle laisse des traces indélébiles. Le printemps se meurt un jour ou l’autre, et naît alors toutes les saisons de l’existence. Il est dans ce spectacle fort bien exprimé.
L’éveil du printemps
De Frank WEDEKIND
Par la Compagnie APRES NOUS, LE DELUGE !
Mise en scène et adaptation : Marion CHOBERT
Avec : Stéphanie Aflalo, Benoit Antonin Denis, Emma Gamet,
Mathilde Moulinat, Florian Pautasso, Sophie Gajan, Romain Pichard
Jusqu’au 5 juillet
Du jeudi au samedi à 19h et le dimanche à 15h
A la Folie théâtre
6 rue de la Folie Méricourt, 75011 Paris
http://www.folietheatre.com/
Réservations : Tél.: 01 43 55 14 80
Monsieur de Pourceaugnac
Un Molière des temps modernes
Réactualiser Molière au 21ème siècle, voilà une bien jolie idée, si le spectacle bien entendu, est bon.
C’est Isabelle Starkier, metteur en scène chevronné, qui relève ce défi et adapte « Monsieur de Pourceaugnac » au théâtre Silvia Monfort. Et le spectacle est bon… Ce n’est pas une des pièces les plus connues de Molière, mais ce qui surprend, d’autant qu’elle fût écrite en 1669, c’est son thème, fort d’actualité. Rien n’a changé : la cruauté et l’intolérance des hommes envers leur prochain.Il ne fait pas bon d’être étranger. Noir ou provincial, c’est la même idée, seule l’époque change.
Monsieur de Pourceaugnac, avocat, Limousin, débarque à Paris pour y épouser Julie, sa jolie promise. Il est beau, parle bien, est un gentilhomme sans histoire. Mais voilà, Julie aime Eraste, et n’a aucune intention d’épouser par contrainte, ce Monsieur de Pourceaugnac, venu de sa campagne lointaine. C’est donc un véritable stratagème que vont mener Julie et Eraste, aidés par deux intrigants voyous, Nérine la servante, et Sbrigani le valet. Fourbes, cruels et sans scrupules, ils vont le mettre à terre, l’humilier, le ruiner, le rendre fou, pour mieux le faire repartir dans son pays d’origine. Par calèche ou par charter ? Rien n’a vraiment changé. Nous l’aurons compris, un Molière à la plume bien écrite, ou les histoires des valets, amants, médecins pervers, et pauvre type protagoniste, se confondent en situations humiliantes et à la morale des plus dérangeantes.
La peur de l’autre…
Là ou tout le travail d’Isabelle Starkier est à saluer, c’est sa capacité à moderniser l’époque en dépoussiérant un texte pas toujours compréhensible. Une scénographie fluide et intelligente, ou les acteurs se déplacent avec magie dans un décor épuré, et où le surplus n’envahit pas l’espace. Son idée originale et gonflée, est d’avoir transformé le limousin étrange, en un noir étranger. C’est bien donc « la différence » qui dérange. Elle va même jusqu’à le mettre à nue … pour de vrai ce Monsieur de Pourceaugnac.
Il y a de la Commédia dell’arte dans ce spectacle. On y chante, on y danse, on s’y amuse comme des fous, on s’enfouit dans des labyrinthes de lumières bien placées, on se laisse prendre au jeu de la manipulation. Et on reconnaît aussi la « patte »du metteur en scène. La prestation des acteurs est remarquable d’adaptabilité et se fondent tour à tour dans des masques (Anne Bothuon en est la créatrice) mystérieux et dérangeants. Quatre acteurs qui remplissent une scène ou des dizaines de personnages apparaissent un à un. C’est aussi la magie du théâtre et le talent des artistes. Ne s’apercevoir de rien et laisser glisser les images devant les yeux médusés des spectateurs. Sarah Sandre est une Madame Oronte qui joue sur les genoux, (mais comment fait-elle ?) et sa prestation n’en est que plus remarquable. Ses partenaires sont comme elle : talentueux.
Qui gagne dans cette comédie ? Les imbéciles et les précieux ridicules. Hélas ! Monsieur de Pourceaugnac abattu par la désopilante variation des hommes, s’en retournera d’une bien étrange façon. Il est doux de se replonger dans des grands classiques français, ou les frontières d’hier frôlent avec celles d’aujourd’hui. Un vrai bon moment à passer avec la Compagnie STAR et Molière.
MONSIEUR DE POURCEAUGNAC De Molière
Par la Compagnie STAR
Mise en Scène Isabelle STARKIER
Avec Eva Castro, Daniel Jean, Jean-Marie Lecoq / Pierre-Yves LE LOUARN, Stéphane Miquel, Sarah Sandre.
Costumes : Anne Bothuon
Musique : Amnon Beham
Crédit photos : Jean-Pierre Benzekri
Jusqu’au 21 juin
Mardi, Vendredi, Samedi à 20h30 | Mercredi, Jeudi à 19h| Dimanche à 16h
Théâtre Silvia Monfort
106, rue Brancion, 75015 Paris
http://www.theatresilviamonfort.com/
Réservations : 01 56 08 33 88
J’me sens pas belle
Embarquement immédiat…
Allez embarquez vous pour une aventure théâtrale pleine de vie, vous ne le regretterez pas ! Elle semble bien nous coller à la peau, la pièce de Bernard Jeanjean.
On se demande souvent si les deux là, sur scène, on ne les aurait pas croisés quelque part. C’est tellement nous…Fanny est célibataire depuis bien longtemps et ça commence à lui peser. Un soir de grosse solitude, (une de plus) elle décide d’inviter un collègue à dîner. Bien décidée à se changer les idées, elle met les petits plats dans les grands, une lumière tamisée, et se dit que peut-être le collègue restera bien couché… avec elle. Au point ou elle en est de toute façon, une histoire d’un soir ne pourra pas lui faire de mal.
Paul arrive aussi peu sur de lui que ne l’est Fanny… Chacun faignant le « tout va bien ». Oui mais voilà… plus facile à dire, qu’à faire. Et c’est ainsi que le huit clos amoureux commence. Fanny tourne autour de Paul comme une araignée vénéneuse, tout en lui balançant à la figure ses obsessions, et ses angoisses. D’un simple dîner qu’elle imaginait facile à conclure, la voilà perturbée par un partenaire plus sensible qu’elle ne l’imaginait. Et elle ment Fanny, elle ment comme pour mieux se dérober devant la vérité qui dérange. Des petits mensonges pas méchants c’est sur, mais qui perturbe le déroulé de la soirée. Paul garçon timide, un potentiel pour tomber « presque » amoureux sans jouer les imbéciles, n’est pas insensible à la belle, se demande tout de même ou il a mis les pieds, et qui est cette fille si étrange… Et la soirée avance. J’y vais, j’y vais pas ? Incertitudes quand tu nous tiens.
Du cinéma au théâtre
De la scène de ménage surréaliste entre ces deux collègues, à la danse loufoque de Paul, tout y passe. On fait tout pour se séduire sans jamais se le dire. On est touché assurément par ces deux âmes déglinguées par la vie, mais qui ne renoncent jamais.
La souffrance d’hier modère l’envie du présent, mais c’est aussi ça la vie… Et c’est ce qui est intéressant dans cette pièce drôle et ouverte sur le quotidien des hommes et des femmes.
L’art de l’adaptation cinématographique à l’adaptation théâtrale, n’est pas chose et écriture facile. C’est en regardant le spectacle de Bernard Jeanjean que nous en comprenons tout le sens. Une belle et cruelle écriture que la sienne. Elle glisse entre les doigts comme une pudeur qui s’échappe de nous tous. Il faut une bonne part de talent et de sensibilité, pour savoir parler d’amour avec justesse… C’est ici, délicieusement bien fait. Le film a précédé la pièce il y a quelques années. Un beau succès déjà. Aujourd’hui, c’est Martine Fontaine qui s’empare du rôle avec talent (elle a collaboré très étroitement à l’écriture, puisque elle est la muse de Bernard Jeanjean). Belle actrice Martine Fontaine. Elle se déplace avec une agitation élégante. La mise en scène de Jade Duviquet est simple et efficace, on y relèvera parfois quelques longueurs, mais elle sait rendre un petit espace scénique en un joli moment théâtral. Yvon Martin est tout en mesure pour un rôle qui lui va bien. Les deux comédiens prennent plaisir à jouer ensembles, et cela se voit. L’authenticité est bien au rendez-vous. Il faut savoir lâcher prise conclue l’histoire, « j’me sens pas belle » rend beau … assurément.
J’me sens pas belle
De Bernard JEANJEAN
Mise en scène de Jade DUVIQUET
Avec Martine FONTAINE et Yvon MARTIN
Jusqu’au 2 août
Jeudi, vendredi, samedi à 21h, dimanche à 17h
La Manufacture des Abbesses
7 rue Véron, 75018
http://www.manufacturedesabbesses.com
Réservations : 01 42 33 42 03
MA COLOCATAIRE EST ENCORE une GARCE !
Détente théâtrale
Un petit moment de détente, la comédie de Fabrice BLIND ! Légère, on sourit tout en douceur. Pas de porte qui claque, mais des canapés que l’on déplie…
La pièce croque les contours de notre société actuelle avec tout ce qu’elle comprend de cruel et de généreux, les gentils, les méchants, la jolie blonde, et le garçon ballot mais pas tout à fait idiot… Un théâtre populaire qui fonctionne bien, grâce à une écriture enlevée, aux rondeurs exquises de certaines répliques, et aux comédiens qui s’amusent à l’évidence comme des fous.C’est une pièce écrite comme des sketchs de one man show !Un défilé de tableaux où s’installent à chaque instant, des personnages sympathiques, roublards et drôles.
L’histoire commence par l’arrivée d’un brave quadragénaire provençal, venant récupérer à Paris un appartement acquit par le biais d’un héritage. Mais un problème avec sa locataire en place, va amener notre sympathique garçon vers des aventures rocambolesques. Sasha, jolie fille et sexy, héberge, son petit ami italien Luigi, escroc en tout genre et abruti macho. Afin de ne pas quitter l’appartement dans lequel elle y exerce ses petits trafics de cartes bancaires, elle fait croire que Luigi est son frère, qu’elle est astronaute et que la longue vue au milieu du salon, est destinée à son travail ! Et c’est ainsi que Hubert Chataigneau, comptable naïf et débonnaire, ira de déboires en surprises avec ses deux colocataires. Sans compter que le joli décolleté de Sasha fera bien entendu fondre notre sympathique Hubert…
Colocation gagnante
On reconnaît le coup de patte d’Anne Roumanoff dans la mise en scène. Rythmée, légère et sachant utiliser l’espace dans les meilleures conditions. Du bon Roumanoff comme on l’aime ! Le talent de Fabrice Blind est évident, naturel et sans complexe. Il joue aussi bien qu’il écrit. C‘est un créatif du langage bien ancré dans sa génération, proche de son public et sachant manier l’ironie du monde et l’humour sans vulgarité. Sir John allias Olivier Thomas, campant notre faux italien, est un comédien déjà habitué aux planches du one man show, et on le retrouve ici dans un registre du play-boy ringard qui lui va bien. Virginie Frank, complice de ses partenaires qui jouait ce jour là, est délicieuse et spontanée. Tout ceci est très bon enfant et c’est là l’essentiel… Souhaitons le même succès à Fabrice Blind pour sa seconde comédie. La première lui a valu 250 000 spectateurs au compteur en 5 ans… un vrai bonheur pour ce grand artiste.
MA COLOCATAIRE EST ENCORE une GARCE !
Une comédie de Fabrice BLIND, Michel DELGADO et Nelly MARRE
Mise en scène de Anne ROUMANOFF
Avec Fabrice BLIND, Marie PAPE, ou Virginie FRANCK et SIR JOHN
Musique Mario SANTANGELLI
A voir jusqu’au 21 juin 2009
Du mardi au samedi à 19h30 et matinées le samedi et dimanche à 17h , relâche le 27 mars
A la Comédie de Paris
42 rue Pierre Fontaine 75009 PARIS
http://www.comediedeparis.com
Réservations : 01 42 81 00 11
Frères Jacques… Dormez-vous ?
C’est le réveil !
Frères Jacques, Frères Jacques… Dormez-vous ? Dormez vous ? Tout le monde se souvient de ce refrain de l’enfance, il berce toutes les générations… C’est aussi peut-être le moyen de se souvenir de l’aventure musicale des Frères Jacques. De l’après guerre au début des années 80, plus de 40 ans se sont écoulés et leurs chansons avec. Un succès longue durée ! Trublions insolents de la chanson française, ils prirent leur nom d’artiste : Frères Jacques !
2009… une idée incroyable traverse 4 jeunes femmes dites : Les FranJines. Remettre au goût du jour, ces chers interprètes oubliés. Un pari fou, difficile, osé. « Frères Jacques dormez-vous » ? Le spectacle commence… Une jolie lumière blanche sur un écran noir…
Apparaît alors la légende des Frères Jacques : une balade de mains blanches, ou l’agilité nous étonne comme au premier jour de leurs premiers pas. Une vidéo défile, vive et colorée, qui nous fait sourire, les souvenirs renaissent. Arrivent sur scène les quatre jeunes femmes (Myriam ALLAIS, Marièle CHARTIER, Angélique DESSAINT, Eve DRUELLE) gantées d’argent. Leur voix nous enchante alors avec un premier clin d’œil musical, « tout autour de la terre »…
Et c’est parti pour 22 chansons du répertoire des Frères Jacques, qu’elles ressuscitent le plus fidèlement possible ; un univers qui faisait rire grands et petits. « Fillette, frère jacques, les footballeurs, La queue du chat, La confiture ça dégouline » pour n’en citer que quelques unes… Mais là ou la difficulté arrive, c’est que le choix du répertoire n’est ni simple, ni drôle, oublié souvent, et que l’on a un mal fou à rentrer dedans. C’est un lourd pari.
Le marchand de sable est passé…
Défilent les textes des plus grands : Queneau, Vian, Sartre, Prévert, Gainsbourg et tous les autres (rappelons que les Frères Jacques n’étaient qu’interprètes). Il y à un sentiment pesant, et l’on décroche. Il semblerait que le rire ne soit plus au rendez-vous. Le répertoire a mal vieilli et peine à nous toucher. Peut-être que des arrangements musicaux plus modernes auraient facilité cette traversée du temps ?
Elles sont pourtant pétillantes ces quatre jeunes femmes, qui se donnent avec une grande passion. Une énergie indéniable, des talents de chanteuses, de danse, de théâtralité, des espaces corporels drôles, fidèles, des jeux de rôles touchants, toutes se révèle des interprètes féminines égales aux interprètes masculins. Saluons également Sophie RIEGE, pianiste talentueuse et comédienne malicieuse… Frères Jacques, Frères Jacques, dormez-vous ? Peut-être que les FranJines, sauront réveiller les plus nostalgiques d’entres vous.
Frères Jacques… Dormez-vous ?
Facétie musicale par les FranJines
Avec : Myriam ALLAIS, Marièle CHARTIER, Angélique DESSAINT, Eve DRUELLE
Pianiste : Sophie RIEGE
Collaboration artistique : Camille TURLOT, Pierre GRIBLING
Création lumières : Eric PELLADEAU
Création costumes : Clothilde PEYRAT, Coraline MURAT
Du Mardi au Samedi à 19h30 jusqu’au 04 avril 2009
Théâtre des Variétés
7 boulevard Montmartre, 75002 PARIS
Réservations : 01 42 33 09 92
http://www.theatre-des-varietes.fr
24 Heures de la vie d’une femme
24h chrono…
24 HEURES DE LA VIE D’UNE FEMME est sans aucun doute, un des grands chefs d’œuvres littéraires de Stefan SWEIG. C’est avec un grand plaisir que nous découvrons aujourd’hui une adaptation théâtrale innovante. Un pari risqué et merveilleusement bien réussi par Freddy Viau, qui nous propose un spectacle intelligent et prenant. C’est si peu simple d’oser une telle aventure…
Au théâtre de l’Essaïon, ou l’espace nous entoure de ses pierres blanches belles à toucher, nous découvrons deux actrices justes, couvertes d’une émotion sublime.
Love story…
1865. Monte Carlo au casino. Mrs C, aristocrate anglaise, veuve, va faire une rencontre sans doute la plus décisive de son existence. Elle durera 24 heures. Un soir, elle croise le regard d’un jeune homme polonais, beau, fragile, suicidaire. La passion du jeu le dévaste entièrement…Il va la fasciner. La troubler, lui faire perdre pied. Comme elle le dit en narrant son histoire au spectateur que nous sommes, « j’aurai tout sacrifié si il me l’avait demandé »… Elle ne voit que lui, il ne voit que le jeu. Et si l’espace d’un instant, le jeune homme peut croire à sa rédemption, ce ne sera que pour mieux se perdre. Hélas…
Magnifique femme prisonnière de son statut social, son corps endeuillé par la vie, et son âme si belle dans son devoir de moral et son devoir de sauver ce jeune homme venu de nulle part, mais si beau… 24 Heures de combat, d’acharnement, de colère et de larmes… Puis de renoncement. Parcourir le temps compté, à coups d’illusions et de rêves. Jusqu’où peut-on aller par désir, par conviction, par trouble manifeste ? Sweig répond très bien à cette interrogation. Même si chacun entendra les mots qu’il souhaite pour mieux comprendre ce message d’amour.
Une femme lumineuse…
C’est avec un respect inouï, que laure Meurisse porte à bout de voix, le texte de Stefan Sweig. Sa voix est belle, ses robes tourbillonnent, s’abandonnent, et nous emportent là dans une chambre, là dans une calèche, là au casino… Toute la finesse d’une scénographie signée Nicolas De Ferran, et qui emmène l’actrice au sommet de son talent.
Il faut l’entendre nous raconter… » Les mains des joueurs, claires et agitées, aux aguets. Les unes nues, poilues ou flexibles, mais toutes nerveuses et d’une immense impatience »… Et nous les devinons ces mains, nous les voyons devant nous, tant la narratrice nous les fait vivres. Si le texte est magnifique et donne toute sa force à cette pièce, il faut reconnaître avec une grande humilité le génie de Laure Meurisse. C’est-elle assurément Mrs C ! Famille talentueuse quand tu nous tiens… (Laure Meurisse est la petite nièce de Paul Meurisse). Mona Lou sa partenaire est dans un double jeu… La bonne, proche de Mrs C, discrète et présente, l’accompagnant avec son violoncelle et sa musique harmonieuse. Puis comme par magie, devient ce jeune homme perdu et donne la réplique avec un simple mot ou une main tendue. Elle y est parfaite, à sa place et tient son rôle avec une finesse évidente.A noter, une lumière intime et douce associant les couleurs choisies aux choses de la vie. Allez vite voir cette pièce de théâtre, qui joue les prolongations tant le succès est fort, vous ne regretterez pas d’avoir passé un moment dans l’univers de Stefan Sweig.
24 Heures de la vie d’une femme
D’après Stefan SZWEIG
Mise en scène : Freddy VIAU
Scénographie : Nicolas DE FERRAN
Avec : Laure MEURISSE et Mona LOU
Au violoncelle Mona LOU
Costumes : Rick DIJKMAN
Lumières : James GROGUELIN
A voir jusqu’au 15 mars, le vendredi et samedi à 20h, dimanche à 18h
Théâtre de l’Essaïon
6, rue Pierre-au-Lard, 75004,Paris
Réservations : 01 42 78 46 42
http://essaion.com
Nous sommes une femme
La blonde et la brune !
C’est ainsi que l’on pourrait différencier les deux femmes de ce spectacle : La blonde, belle mais idiote, et la brune, piquante et carnassière ! Seulement voilà… la blonde n’est pas si idiote qu’on voudrait bien le penser, et la brune est plus morbide que carnassière. Mais là n’est pas tout à fait le sujet.
Un soir dans un appartement chic et tout de noir décoré, Claude attend l’arrivée de son hôte. Un soir pas tout à fait comme les autres, c’est un premier rendez-vous amoureux via internet. Sacha et Claude… Claude et Sacha… la fusion prendra t’elle ? On sonne, et là un quiproquo s’annonce : deux prénoms masculins dans deux corps féminins. Fatale erreur ! D’emblée Claude (la brune), surprise de la situation mais suffisamment perverse pour s’en réjouir, va mener la danse, du moins le croit elle. Sacha (la blonde) confuse mais sur ses gardes, n’entend pas se laisser croquer sans rien dire. Sous ses airs de fille stupide, elle va bousculer avec un certain génie naïf, les états d’âme de la première. Inquiétante, au bord de l’hystérie, on devine rapidement que Claude est une femme éprouvée, et que la vie ne lui a pas fait de cadeau. De cette rencontre peu vraisemblable, va naître une entente cinglante, mais étonnante. Chacune rêve du grand amour ! L’éternel prince charmant.
Faudrait-il pour cela, qu’elles décident de se remettre en question !
Soudain…
On sonne à la porte. « Vous attendez quelqu’un dit l’une ? Non ! Répond l’autre ». Et là surprise, Camille, « un homme charmant », pointe le bout de leurs espérances ! Que fait-il là ? Mystère… Commence alors, un balai frénétique entre les trois personnages. Trio amoureux et drôle, pathétique parfois, mais toujours complice d’une même idée : Quelqu’un va-t-il m’aimer ce soir ? Qui fera quoi et avec qui ?
Il y dans la pièce de Charlotte MATZNEFF et Jean-Philippe DAGUERRE, un mélange des genres : de l’humour, des idées noires, du suspens, la solitude des hommes, sans oublier la part de rêve. L’idée même de la confusion sur l’identité sexuelle est intéressante. La mise en scène de Jean-Philippe DAGUERRE et les décors restent académiques, mais l’espace il est vrai, ne permet pas de grandes enjambées … Cependant, plus le temps passe et plus le texte ne semble pas totalement abouti, comme une profondeur manquante. Les 1h10 passent vite, il faut tout dire, tout faire passer, mais trop vite. Dommage. J’ose dire : c’est un regret. Mais on sourit souvent, on se sent touché par ces personnages, on s’identifie peut-être… Les comédiens sont à leur place. La grâce de Charlotte MATZNEFF l’emporte sur le côté un peu trop mélodrame de Séverine DELBOSSE, et Thierry BATTEUX n’en fait ni plus ni moins. Petit moment de théâtre à faire fondre comme un bonbon acidulé, un dimanche après-midi. « Nous sommes une femme » oui ou non ?
NOUS SOMMES UNE FEMME
De Charlotte MATZNEFF et Jean-Philippe DAGUERRE
Mise en scène Jean-Philippe DAGUERRE
Décor : P.BATTEUX et JF COQUERY
Lumières : Simon GLEIZES
Théâtre du Petit Gymnase
38 boulevard de bonne nouvelle – Paris 10è
http://www.theatredugymnase.com
Réservation : 01 42 46 79 79
les samedis et dimanches à 18h jusqu’au 15 mars 2009
AGNES SORAL AIMERAIT BIEN VOUS Y VOIR
Un jour mon prince viendra…
On connaissait son amour du 7ème Art et son talent inoubliable dans « Tchao Pantin » film de Claude Berri des années 1980, mais il ne faut pas oublier son autre grande passion : le théâtre. Personne ne s’étonnera donc de la retrouver sur scène dans un one woman show étonnant écrit en collaboration avec Jacques Pessis sur une mise en scène de jean-Luc Moreau.
Seule en scène durant 1h20, elle y incarne une femme célibataire à la recherche du grand amour. Tailleur rouge et sexy, clopinant sur un seul talon aiguille, une comédienne est sensée venir lire des textes de poésie sur scène. S’adressant à son public, elle s’excuse de ne pouvoir commencer tout de suite, son habilleuse s’étant enfermée dans sa loge, pour cause de déception amoureuse. !
Se prenant alors au jeu de l’inquiétude, elle raconte principalement aux Messieurs de la salle, les déboires de sa vie sentimentale… On ne sait jamais si l’homme de sa vie était présent ! Et c’est ainsi que Melle Agnès Soral se livre à un texte quelque peu décapant ! Tour à tour, les ex hommes de sa vie sont passés en revue. On les retrouve tous, bons ou méchants, ses mâles et ses maux… C’est aussi un regard au vitriol sur sa meilleure amie, l’amour, la jalousie, le cul (c’est ainsi qu’elle le dit haut et fort) et la bêtise humaine.
Obsédée textuelle !
Elle va vite, (trop même) enchaîne tous les thèmes, tourbillonne comme pour mieux s’abandonner à son public, voire au futur homme de sa vie… Le trouvera t’elle ? En attendant on peut aussi se demander si elle va y trouver son public… Car dans ce spectacle, il semblerait qu’Agnès Soral ait adopté le ton très en vue de notre temps : à savoir provocation et vulgarité. Elle nous avait habitué à mieux. Du moins à plus soft. C’est dérangeant, agaçant presque, de voir cette jeune femme flirter avec un texte qui nous échappe. Vous l’aurez compris la provocation est de mise. La vulgarité faite-elle rire ? Sans doute puisque le public rit « gra..cieusement » de bon cœur. Elle mime le sexe, elle déculotte les uns et retourne les autres, va même jusqu’au strip-tease et se demande au final si les femmes ne seraient pas les meilleurs des maris !! Pas très à l’aise avec ce texte ou du moins au début, texte sur joué, clichés vus et entendus. Pas de surprise.
Mais elle est pétillante Agnès Soral, et finit par se rattraper en seconde partie. Peu à peu elle rebondit, gagne en assurance et s’empare du texte différemment. On pourrait presque y croire. Surtout lorsqu’elle se lance dans des imitations, ce qu’elle réussit le mieux. Guidée par Jean Luc Moreau, metteur en scène confirmé, il lui fait parcourir l’espace scène de long en large, et la rapproche au plus près de son public. Efficace ! Exercice périlleux donc que de vouloir faire rire. Agnès Soral s’y essaye. Sans convaincre vraiment. L’humour gras et la provocation vous font rire ? Alors vous y trouverez votre bonheur. Pour les autres passez votre chemin ! Agnès Soral ne vous y verra sûrement pas…
Agnès Soral aimerait bien vous y voir
Texte d’Agnès Soral
Mise en scène : Jean-Luc Moreau
Lumières : Jacques Rouveyrollis
Au théâtre du Petit Gymnase
30 boulevard Bonne Nouvelle, 75009 Paris.
http://www.theatredugymnase.com
Du 13 janvier au 26 avril 2009.
Le mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi à 21h30. Le dimanche à 16h
Réservations : 01 42 46 79 79